mercredi 28 mars 2018

28 mars


Les ouvriers donnent de grands coups de marteau pour assembler (ou désassembler ?) un échafaudage voisin. Dans les interstices sonores on peut entendre s’élever le chant d’un oiseau nidificateur. Quand les troglodytes mignons auront été chassés par les ouvriers casqués, et que dans les interstices on n’entendra plus qu’une rumeur de maintenance humaine, alors il sera temps pour Binh-Dû de déménager.

Le ciel traversé de stratocumulus correspond parfaitement au désir de Binh-Dû. Oui, c’est exactement ce qui lui convient, cette élévation cotonneuse, ce défilement serein, l’alternance aléatoire des ombres et des ensoleillements. L’affirmation du bleu. L’approfondissement des perspectives. C’est sous ce ciel que Binh-Dû choisirait de vivre sa vie. Comme une attirance érotique vers une certaine qualité de peau.

Contre sa peau Binh-Dû perçoit la raideur du flocage d’une tête de mort, sur le vieux tee-shirt qu’il porte à l’envers. Non pas le devant derrière mais les coutures à l’extérieur. Est-il à ce point à court de tee-shirts ? Ou est-ce encore l’instinct carnivore ? Une femme le croise, un ananas à la main tenu par la rosette, telle une arme dont elle se ferait un plaisir de lui asséner un coup sur le crâne. Peut-être devrait-il porter un tee-shirt bleu ciel.