dimanche 15 avril 2018

15 avril

Certaines personnes accumulent les soucis avec une telle insistance qu’on peut se demander si elles ne subissent pas une loi imparable, telle celle qui veut que les fleuves s’écoulent dans le sens de la pente. La raison des lois n’est pas toujours limpide, bien sûr on peut vouloir qu’elles servent à maintenir un ordre des choses préférable à un autre et surtout au désordre. Mais longtemps les humains ont vécu sans connaissance scientifique du cycle de l’évaporation. Ils priaient le ciel pour qu’il pleuve ou qu’il cesse de pleuvoir. Les soucis accablants ont peut-être pour raison de reporter à plus tard la résolution de problèmes plus fondamentaux.
Binh-Dû évoque peut-être « certaines personnes » pour éviter d’être plus précis, voire de considérer sa propre situation. Il possède un talent éprouvé pour la procrastination. De plus, il écrit (façon de retarder l’avenir) ! Ce qui s’accumule ne peut être qualifié de soucis, à peine d’occupations, il s’agirait plutôt de réflexions. Comme dans un jeu de miroirs où l’on se perd à se voir partout, non seulement démultiplié mais inversé, où l’on ne sait même plus distinguer sa gauche de sa droite – et si je lève ma main droite, n’y aura-t-il pas un moi-même qui, tout en me regardant bien en face, se mettra à lever sa jambe gauche ?