samedi 26 janvier 2019

26 janvier


Les portes grincent au son de la perceuse. Les doubles vitres se rapprochent l’une de l’autre. Le réfrigérateur se tait. Non loin de là, les péniches regardent par-dessus les ponts pendant que le fleuve rabote les berges de l’île. Il n’y a presque pas de vent, on a le droit de marcher sous les arbres. Mais les sentiers sont boueux, ce qui justifie un confinement sous rubalise – des fois qu’un promeneur procédurier tacherait le bas de ses pantalons. Les premières jonquilles ont épanoui leur bourgeon, de mémoire d’homme vivant l’hiver n’a jamais été aussi chaud.
            Binh-Dû fourre des vêtements dans la benne installée à cet effet, sans qu’il y entre beaucoup d’altruisme. Y disparaît une parka qu’il portait alors qu’il était moitié plus jeune, alors qu’il aurait hurlé d’angoisse à l’idée qu’elle le suivrait tout le temps de sa vie déjà vécue. Il apporte à la pharmacie un sac plastique en voie de désagrégation rempli de médicaments périmés. Il enlève les toiles d’araignée du plafond. Là, juste au coin vers où dérive son regard quand il cherche un mot. Il secoue une écharpe incrustée de poussière, l’hiver n’a jamais été aussi doux.