dimanche 10 février 2019

10 février


                Un jour les chiens seront toute la joie qu’il nous restera. La barque se sera échouée sur l’île, Alma aura mobilisé ses dernières forces pour la hisser de quelques centimètres sur le sable. Avant de se laisser tomber, d’apaiser le vertige. S’il y avait de l’eau, il n’y aurait pas besoin de chien, raisonne-t-elle absurdement. Si le soleil ne brûlait pas ma nuque, je pourrais me retourner sur le dos et regarder le ciel en face. Si Corpus n’avait pas été aussi fort, c’est lui qui serait sorti le premier de la barque pour explorer les alentours.
                Mais quoi que Binh-Dû redoute, la joie ne saurait mourir ni les forces s’épuiser. En rouvrant un œil, Alma aperçoit un cocotier qui penche comme une invitation. Elle se remet debout sur ses deux pieds, accommode sa relation au ciel. En arrière de la plage, la végétation est luxuriante et les animaux nombreux, leurs cris supplantent le bruissement des vagues à mesure qu’Alma s’avance. Les perroquets surtout sont assourdissants. On dirait qu’ils veulent l’avertir de quelque chose. Mais ce n’est peut-être que déjà-vu.