dimanche 24 février 2019

24 février


       Les malentendus féconds portent à rire. À un moment Binh-Dû dit « Moi aussi je t’aime » et cela n’a rien à voir. C’est un rire étrange, à l’intonation incertaine. Comme de fixer la nuque de sa partenaire, toutes oreilles aux aguets. En pleine nuit le voisin saute sur son plancher pour amuser une fille rencontrée quelques heures plus tôt en boîte de nuit, heureusement ce n’est pas le voisin du dessus. Les corbeaux se gèlent les ailes en attendant que le ciel rosisse à l’est. Ailleurs, des lèvres d’éternel bébé cherchent un sein tiède et odorant.
       Il n’en faut pas tellement pour calmer l’angoisse : une confirmation avantageuse, le souvenir de ce qui est de toute éternité, un zeste d’ironie désinvolte. Un petit coup de chauffage électrique. Non, Binh-Dû n’offrira pas le thé aux agents assermentés, cela prêterait à malentendu. Si compliqué de faire la distinction entre ce qu’il aspire à devenir et ce qu’il sait ou ne sait pas être dès à présent. Déjà qu’il y a doute sur son identité. Il dansera un peu si le groove surgit, il se caressera la barbe (seuls les poils blancs crissent). Et ce sera bien assez.