jeudi 7 mars 2019

7 mars


Était-ce l’oubli du corps ? Et d’un coup l’on se souviendrait : en face, tout contre, il y a un corps, rien moins que cela, avec sa densité, sa dynamique, sa consistance. Ses formes d’une beauté à pleurer, ses odeurs, la texture de sa peau. Son goût, si varié selon les endroits approchés, la générosité de son abandon. Il y a une vibration qui est pure musique, toujours étonnante. Il y a des yeux qui posent un regard, où tout est dit de l’amour, où l’on est à destination, enfin, prêts à poursuivre le voyage. Binh-Dû se souvient même de ce qu’il n’a pas vécu. Il cherche des explications dont son ventre n’a cure – le nombril de Binh-Dû le contemple, éperdu d’indulgence. D’exaspération tu récrimines, mais tu es d’un autre espace-temps, semblable et improbable. Tu es le cerveau d’un cerveau et tu voudrais lutter contre celui d’un abdomen. Alma se tait mais ce n’est pas qu’elle n’ait rien d’intéressant à dire. C’est juste que tout a déjà été donné à l’entendement de Corpus, et que le déni est une perte de temps. Comme les mots tus sont doux ! Comme l’intelligence rayonne ! Dans l’intimité des caresses, peut-être murmure-t-elle au diapason des vagues ; et sur l’autre rive de l’océan, Binh-Dû, en adoration, tend l’oreille.