Nous avons fait l’amour. Comme ce mot a l’air
banal – trivial, usé, tout trait distinctif quasiment effacé par l’usage – mais
comment décrire une telle action en acte ? Cette création ? Cette
union magique ? Je pourrais dire que nous sommes devenus deux silhouettes
prises dans une danse hypnotique sous le talisman chaloupé de la lune, d’abord
lente, si lente… deux plumes appariées flottant dans la substance claire d’un
ciel liquide… puis qui accélèrent, de plus en plus, pour finalement n’être plus
que photons de lumière pure. (…)
Ou bien je pourrais dresser la liste des
impressions, des images encore brillantes, illuminées à jamais par la cambrure
blanche de ces premières caresses, le premier regard après qu’ayant écarté la
chemise de laine, j’ai vu qu’elle ne portait pas de soutien-gorge ; la timidité
de ses hanches se soulevant imperceptiblement lorsque j’ai fait glisser la rude
toile de jean (…).
Mais il me semble que la meilleure façon pour moi
de communiquer la beauté de ces moments consiste à répéter, tout simplement,
que nous avons fait l’amour. Et consommé ainsi tout un mois de regards furtifs,
de sourires prudents, de frôlements accidentels de nos corps, trop flagrants ou
trop secrets pour n’être que des accidents, et toutes les autres petites
vignettes incomplètes du désir… et peut-être par-dessus tout, consommé la
connaissance partagée de ce désir, et de ce désir retrouvé, et du progrès
irrépressible de ce désir… dans une déflagration interne parfaitement
silencieuse tandis que tout mon corps tendu explosait à l’intérieur du sien
comme un fluide électrique.
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Après une certaine dose d'affection, tout le monde aspire à un peu de répit pour penser à l'amour à tête reposée.
Ken Kesey (Et quelque fois j'ai comme une grande idée)
& Jim Harrison (Nord-Michigan)