lundi 29 mars 2021

Que plane encore un peu l'évocation

26 décembre 2019

(...)

Ou non, ou d’une façon trop dilettante. Que plane encore un peu l’évocation.
La boutique n’en finit pas de fermer, elle reste ouverte pour un dernier client puis un autre, qui semblent à peine moins désorientés que le vendeur. Personne ne l’attend, dans la remise ne subsiste aucune trace d’un coït malaisé qui avait eu néanmoins l’affriolante saveur de l’interdit – où tout cela a-t-il disparu ?
Il rentre à pied.
Lydia est un prénom de substitution, c’est une sonorité joyeuse dans la grisaille, comme si des arbres allaient émerger du trottoir et s’ébrouer de toute la verdeur de leurs racines nouvelles, et ils secoueraient leurs feuilles pour nous faire apprécier la pluie, et tu serais héroïque mais doux. Tu es doux. La plupart du temps tu l’oublies, il te faut le contact de ta main sur ta joue – comme si cette main caressait le visage d’une Lydia assoupie – pour t’en souvenir. Mais il n’y a pas de mérite à être qui l’on est. C’est juste une affaire de circonstances, la solution que chacun a trouvé, très en amont de ce jour-ci, pour se dépatouiller de ses souffrances. Pas de mérite à être héroïque, tous les héros vous le diront. Seuls les salauds croient avoir le mérite de leur saloperie.
Dans l’escalier qui mène à son studio du septième étage, le vendeur n’est plus qu’un locataire qui dira Bonsoir s’il croise quelqu’un.
Il est arrivé sans encombre.
De même perçoit-il l’avenir.
 
(à suivre)

vendredi 26 mars 2021

D'un passé inventé, extraire l'intensité ?

25 décembre 2019

Tu peux ressasser, extraire du passé réel ou fabulé des images, des intensités, des sentiments vibrants, cette résonance dont tu aimes tant signaler l’intuition – et partant ta sensibilité –, tu peux substituer des virgules aux points finaux et relier toutes les histoires de tous les livres – cet homme a aimé deux fois en plongeant dans la rivière, cette femme est morte d’avoir mal évalué le champ de sa vengeance, et dans cette ville on ignore ses voisins –, tu peux comme chaque jour baisser la tête plutôt que de la lever vers un ciel uniforme – la nuit conseille l’hibernation aux craintifs et aux affligés  –, tu peux confondre tous les prénoms et en inventer de nouveaux qui t’évoquent des fleurs, tu peux retrouver dans un regard un regard qui jamais ne s’est posé sur toi, tu peux refuser de te plaindre aussi – et voir dans le palmier qui évente la pollution sur la corniche une satisfaisante imitation de l’arbre –, tu peux lancer des appels dans l’espace bien qu’il te manque accréditation et mot de passe, tu peux rêver bien sûr – et au son de ta propre voix t’enivrer –, tu peux boire un fond de bouteille qui ne s’est pas encore évaporé, tu peux fermer la boutique et revenir demain – et peut-être voudras-tu alors parler de Lydia.

(à suivre...)

jeudi 25 mars 2021

Comme une brûlure de papillon

24 décembre 2019

 
Ah mais c’est qu’on te prend de court.
Lydia, oui, si rien d’autre ne vient.
Une grosse part de tarte au citron ?

Des larmes irrépressibles, à chaque fois.

Comme une brûlure de papillon.
Cela ne se prémédite pas.

Noël frappe à l’huis comme un sourd.

Lydia est un souvenir lointain.
De quoi veux-tu suivre la loi ?

L’excès d’amour physique donne le ton.

Tu bâilles, à croire que tu es là.
Mais tu n’as rien préparé, non.

mercredi 24 mars 2021

Crois-tu qu'il te suffise de faire l'arbre ?

23 décembre 2019

       L’un des problèmes de Binh-Dû est qu’il se trouve très drôle alors que ses proches manifestent une profonde consternation. Ce qui le fait rire derechef.

       On le perd ! Vite, de l’oxygène ! Ou du gaz hilarant, mais pour qui, pour celui qui se bidonne déjà ou pour ceux qui s’agitent et s’inquiètent autour ?

       Plus personne ne dit "derechef", ne le pense même. Plus personne ne pense à l’imparfait du subjonctif. Justement, c’est ça qui est drôle !

       Et les feux qui ravagent tout un continent du fait du réchauffement climatique, ça te fait rire ? Ben non, mais c’est pas en pleurant que j’éteindrai l’incendie.

       Et tes espoirs, et tes désirs, tu les éteins comment ? Crois-tu qu’il suffise de faire l’arbre en pays tempéré, et pourquoi, à quelles fins ?

       Mais je voulais parler de Lydia. Elle est comme toi – un arbre, un animal ? –, sa vision périphérique est une prescience. Son humour est incertain.

À suivre…

mardi 23 mars 2021

Confondrais-tu le désir et l'espoir ? [à base d'imparfait du subjonctif]

22 décembre 2019

Confondrais-tu le désir et l’espoir ? Qu’est-ce qui, de l’un et de l’autre, s’il reste d’une part l’un et d’autre part l’autre, t’intéresse le plus ? Le désir va de soi, dirais-tu. Jeune sot ! L’espoir est un vain mot. Pauvre vieux !

Tu n’as pas encore rencontré le médecin qui te dira que passer un tiers de ta vie en chien de fusil finira par te raboter les vertèbres. Oui mais quoi faire alors, dormir debout ? Tout se tasse, même le souvenir de ta dernière pirouette.

Tu faisais les pieds au mur pour échapper à  la prison de ton mental. Peine perdue, tu as chopé un lumbago qui a sévèrement ralenti ton sens de la répartie, au point que l’espoir, ma foi, n’était plus vraiment d’actualité.

Ou était-ce le contraire ? Fallait-il que tout semblât perdu pour que tu conçusses d’inoffensives espérances ? Et sentisses monter un désir apatride, oh oui, accoster sur cette île, faire ton trou sur cette plage, mourir enfin d’éternité !