Ce jour
où il ne sera plus raisonnable d’envisager que tu remportes le tournoi de Wimbledon.
Même en double, même en vétéran. Déjà que tu n’as jamais réussi un service autrement
qu’à la cuillère. Jusqu’alors tu te flattais de n’appartenir à aucune catégorie
(tu t’en plaignais aussi).
Le jeu
du dedans-dehors, tu connais bien, le cri de la faute t’autorise à monter dans
les aigus, par la bande du filet tu vois l’intercession d’un dieu. Et ainsi
rêvais-tu d’amours impossibles. Où tu n’étais pas toi-même, sans être tout à
fait un autre, où tu étais le meilleur.
À vrai
dire, tu te débrouillais mieux au ping-pong. Mais qui rêve de devenir champion
de tennis de table ? Tu aimais la victoire mais ce n’était pas si
important, l’important résidait dans le dessin de trajectoires. Tu aimais les
courbes et la confirmation du rebond.
Tu
aimais les seins des filles. Tu te voulais champion du plaisir dispensé. Toutes
les histoires que tu imaginais aboutissaient à une reconnaissance, éperdue. Tu
prendrais place dans l’Olympe. Tu régnerais, indiscuté. Mais te voilà simple mortel ?
Trahison ! Infamie ! Ô désespoir…