La force
du vivant est la joie. Maquillée parfois de quotidien – se nourrir, se
protéger, parvenir jusqu’à l’abri de la nuit – mais telle est-elle autour de
nous, si puissante, si exemplaire. En nous ? Pauvres humains dans leurs
voitures, tripotant leurs bidules électroniques. À l’arrêt le moteur cliquette,
dehors il fait chaud dès les premiers pas vers la place de l’église.
Un
vieillard tout tordu tend son visage buriné sous la fontaine, l’eau scintille
dans sa barbe quand il se redresse un peu – jouvence ? Il observe le touriste
qui hésite au son des cloches sur le chemin à suivre, trois propositions sur le
poteau. Question de génération, de racines, « Je vais plutôt prendre le
sentier du col », finit de se décider, à voix haute, le touriste.
Comme
s’il s’agissait de commander dans un restaurant. Mais ce col lui aussi est sous
la neige, on l’aperçoit entre deux sommets, par où passent les nuages. Depuis
un rocher éboulé déjà la vue est belle, à contempler sans méditation. Trois
marmottes pointent leur nez ; un bouquetin ; un accenteur alpin son
bec. Le « je » qui regarde, immobile, est dénué de motif.