mardi 17 décembre 2019

17 mars


La grêle fouette son bienfaisant inconfort.
C’est bientôt fini.
Cela va commencer, attention !
Les oiseaux s’indiffèrent.
Et ce chat, peinard, entre les flaques, passé l’âge d’être craintif.
Ton manteau tu n’en as pas besoin.

Les canalisations apportent à domicile la mort, plus rarement l’amour.
Mais est-ce une raison pour flipper ?
Avec tes os on pourra reconstituer un squelette de loup.
À jamais figé dans le guet.
Vois comme elle t’attendait.
Sa silhouette encore imprécise.

lundi 16 décembre 2019

16 mars


Procéder par étapes, d’abord la détestation. Les gens autour sont hideux, leurs voix, leurs mots, leurs gestes. Les mieux adaptés sont carrément ignobles avec leur air satisfait. Bon. De quoi déblatérer pendant des heures. Tout contaminer, soi-même on est horrible. Passer à la suite : l’espoir est toxique. Celui de « tant qu’il y a de la vie », une vraie dégueulasserie. Ou de « la prochaine fois peut-être ». Cet espoir-là n’aboutit qu’à confirmer le désespoir. Car entendons-nous bien, le désespoir est toxique non moins. Pas besoin de faire un dessin. La conclusion dès lors va de soi, il s’agirait de vivre au-delà de l’espoir et du désespoir. Vous ne sentez pas le soulagement, d’un coup ? Enfin morts, on va pouvoir commencer à vivre ! On va même pouvoir ressortir de l’armoire ce bon vieux principe de plaisir dont d’austères figures nous avaient expliqué qu’il jurait trop avec notre dignité. Eh bien non, il nous va parfaitement, on n’est pas loin d’être séduisants. Il se marie sans obstacle majeur avec notre éthique, contrairement avec ce qu’on avait cru. Une habitude à prendre, sans doute. Et après, que se passe-t-il ? Les gens sont moins laids, ils sont biscornus (dit-elle). Ils sont drôles aussi, vus en léger décalage. L’altérité fait moins violence (suggère-t-il), te souviens-tu quand tu venais de naître et que dans ton appréhension du monde primait l’étonnement ? Au feu l’espoir, donc, et ça nous redonnera de l’avenir.

dimanche 15 décembre 2019

15 mars


           Va plutôt chercher l’inconfort là où il s’impatiente (l’inconfort n’attend pas sur un divan moelleux avec une coupe de fruits à portée de main indolente, l’inconfort a été jeté comme un malpropre dans le placard à balai, il est sa propre raison d’être, sa métonymie, sa tautologie, son comble sous l’escalier), dans une poche de ses haillons tu retrouveras l’enthousiasme. Et puis sors d’ici, on n’en peut plus de tes figures de style et de tes allégories puériles, secoue les puces de ton chien ou les figues de ton figuier, cours, dépêche-toi, pars quelque part !
           La serveuse vous apporte vos boissons dynamisantes à base de fruits. Tu regardes la feuille de menthe qui repose sur une couche de glace pilée, te voilà la feuille à la main, tu regardes les gouttes couleur carotte détox qui tombent sur la surface blanche de la table, enfin tu comprends qu’une serviette en papier te serait utile. Comme tu es lent… Combien de fois te quittera-t-on gentiment, en louvoyant autour des récifs de la lassitude, de la déception, de l’insuffisance et de l’incompétence ? Tu diras merci, désolé, attention à ta manche, et il s’agira de tout autre chose.

samedi 14 décembre 2019

14 mars


           À moins que tu ne veuilles continuer à danser avec les mariées, toutes semblables dans leur robe blanche, et fatiguées déjà de la cérémonie, des discours, des odeurs de parfum mouillé qui se superposent sur leurs joues, fatiguées déjà de la première nuit d’une nouvelle vie supposée les attendre et les combler, oh ces regards qui se posent sur elles comme si elles le méritaient, toi tu sais qu’il n’y a aucun mérite à se marier avec un plus ou moins grand connard égoïste, ils se ressemblent tous, on pourrait intervertir les mariées cela ne ferait pas une grosse différence.
           À l’une, à l’autre tu ferais tes yeux éperdus, tu enverrais dans l’atmosphère le plus lisible des messages secrets, et si vous vous retrouviez derrière un buisson tu dirais que jamais, que toujours, tes petits serments de nazi, allez tu pleurerais bien deux ou trois larmes montées du fond de ton cœur tandis qu’à l’autre bout du jardin un genre de curé tiendrait salon sous la pergola, arguant des vertus de tempérance et de persévérance, la mariée peut-être accepterait que tu l’embrasses mais sans déranger sa mise en pli ni les dentelles de son chapeau et s’il te plaît, enlève ta main !

vendredi 13 décembre 2019

13 mars


           À force de prétendre que tu n’as rien de singulier tu vas finir par te faire bouffer par l’un ou l’autre zombie qui nous zyeutent derrière la haie. Très cher, passez devant, je vous rejoins. Déjà on ne te voit plus. Tu ressembles à cette actrice, là, j’ai oublié son nom.
           On jettera des cailloux dans la rivière pour faire pleurer une petite fille, d’accord ses vêtements sont trempés et elle saigne un peu au mollet, mais c’est qu’elle bougeait tout le temps, c’était difficile de bien viser. Et puis c’est elle qui a commencé.
           C’est comme si tu te méfiais de tous les aquarellistes sous prétexte que Hitler barbouillait des toiles quand il n’était encore qu’un jeune connard arrogant et plaintif. Je m’en fous, je sais pas dessiner mais c’est pas une raison. Fais-moi confiance, un peu.
           Grandir, grandir, les adultes n’ont que ça en tête ! Non mais ils ont vu leur tronche ? Qui pourrait avoir envie de leur ressembler ? Et puis c’est absurde, vu qu’eux-mêmes font tout leur possible pour paraître plus jeunes. Ça pue le piège, cette histoire.
           Mais qu’est-ce que tu attends, bon sang de mauvais sang ! On est déjà en retard, la soirée à peine entamée est un désastre. On reprend depuis le début ? Allez, au point où on en est… Non, toujours pas ? Venez, très cher, nous reviendrons un autre jour.