(22/n)
Comme un
signal. Ce n’est pas clair, elle a allumé dehors et elle vérifie que la porte
est verrouillée. Qu’est-ce que tu fais ? demande Rémi. Dans la cuisine, il
n’a rien entendu. Elle lui raconte, les cris, les gens qui couraient. Vigiles
et migrants, un jeu vraiment pas drôle, Rémi propose d’aller voir. Et puisqu’à
deux tout devient évident, elle sort avec lui.
L’air est
frais, chacun a mis son bonnet, il n’y a personne. Ils longent le grillage qui
sépare la rue des voies ferrées, en regardant de l’autre côté, ils ne voient
que les masses sombres des wagons de fret. Ils marchent en direction de la poursuite dont Céline a été témoin, encore une centaine de mètres, deux cents mètres, la rue
bifurque, ils pourraient continuer sur un sentier étroit, peu engageant, entre
le grillage et un mur de briques délimitant des propriétés privées. Du côté des
voies, à bonne distance on aperçoit trois faisceaux de lampes-torches qui
s’égarent sans conviction à droite à gauche tandis que les vigiles reviennent.
Trop d’endroits où se terrer.
Viens, ça ne
sert à rien, dit Rémi, et ils repartent en passant cette fois par le
centre-ville. Céline déteste cette atmosphère typique de la province, plus un
chat passé dix heures du soir. Un bar ouvert, à éviter. Les enseignes au néon,
boutiques, agences immobilières, DAB, quelques fenêtres jaunes, la lueur
bleuâtre des postes de télévision. Ce serait bien d’avoir un chien, non ?
suggère soudain Rémi, le soir on se promènerait avec lui. Et on le lâcherait
sur les vigiles ? Mais non, elle n’y est pas du tout, Rémi pensait en
général. Elle n’a jamais compris sa faculté à ne pas s’appesantir sur quelque
situation que ce soit, elle l’admire aussi pour cette raison. Je n’aime pas les chiens,
et hors de question que je le promène, conclut-elle.
(...)