Un jour que Binh-Dû marchait les yeux fermés, un gardien de la paix l’interpella.
Il tenait à l’avertir qu’au bout de la promenade la grille était sur le point
d’être fermée. Binh-Dû remercia et reprit son chemin, au pire il s’envolerait.
Au mieux il sent son cœur se contracter dès que s’élève
la voix de la chanteuse qui invariablement à travers les années produit un
phénomène lacrymal pouvant s’apparenter à l’érection. C’est si beau, de cœur à
cœur.
Il faudrait aussi mentionner les paulownias en fleurs, leur parfum
infiniment consolateur. Combien proches parents sont la consolation et la
dévastation. Se trouver écartelé entre l’enfance et le regret de ce qui ne sera
jamais embrassé.
Car pendant qu’avance le printemps, une chanteuse parmi d’autres court
en riant après un mouton. Cela se passe tous les jours, c’est une image
terrible. Et Binh-Dû voudrait être le mouton sur l’île, et rire au dépit des
égorgeurs.
(merci à Camille)