vendredi 27 avril 2018
27 avril
Le comble de
la suspension c’est l’immobilité, théorise Binh-Dû, aux prises avec sa nasse.
Il s’envolait au-dessus des falaises, cela faisait longtemps, il aurait aussi
bien pu se retrouver à faire des bulles de poisson. Souvent ces derniers temps
il rêve d’une randonnée circulaire, le tour de quelque chose, dans un
paysage grandiose qu’il reconnaît et qui l’attend. Au réveil il cherche à quoi
correspondent les images qu’il en a retenu mais c’est contradictoire, la mer,
les montagnes. Peut-être un jour dans sa vie éveillée se retrouvera-t-il sur une île escarpée et il saura que c’était en ce lieu-là de toute éternité.
Peut-être un jour finira-t-il par déménager, à force de signaux sibyllins ou
d’incitations vigoureuses. Ses amis le lui conseillent. Dix
semaines se sont écoulées depuis qu’il a vu celle qu'il aime pour la dernière
fois, à fin d’apaisement émotionnel leur communication est interrompue. Binh-Dû
se souvient du pacte d’inventivité qu’ils avaient passé ensemble, et même dans
l’absence ils acceptaient de s’en remettre à l’imagination des astres ou du hasard. Il lui apparaît désormais que le pacte est gelé.