Ils t’ont baguée, du coup…
- Oui… Ça me brûle aux phalanges, j’ai de l’eczéma. Mais je fais avec. J’ai le droit de l’éteindre cinq minutes toutes les deux heures. Pause-pipi.
- Tu es en surveillance intégrale : voix, vidéo, localisation…
- Évidemment. Je suis comme tout le monde en fait, ni plus ni moins. C’est marrant, j’avais toujours refusé d’en avoir mais c’est fou ce que la bague te facilite la vie. J’accède à tous les magasins maintenant, tous les services standard. Je prends le tram sans guetter les botcops. (…) Tout était laborieux avant, il fallait redécliner son identité pour chaque service, chaque zone. Là c’est fluide, je me sens presque intégrée, reconnue par les systèmes. Finalement ça me soulage…
- Oui… Ça me brûle aux phalanges, j’ai de l’eczéma. Mais je fais avec. J’ai le droit de l’éteindre cinq minutes toutes les deux heures. Pause-pipi.
- Tu es en surveillance intégrale : voix, vidéo, localisation…
- Évidemment. Je suis comme tout le monde en fait, ni plus ni moins. C’est marrant, j’avais toujours refusé d’en avoir mais c’est fou ce que la bague te facilite la vie. J’accède à tous les magasins maintenant, tous les services standard. Je prends le tram sans guetter les botcops. (…) Tout était laborieux avant, il fallait redécliner son identité pour chaque service, chaque zone. Là c’est fluide, je me sens presque intégrée, reconnue par les systèmes. Finalement ça me soulage…
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L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées. Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle. Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter. Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste. Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu à caractère subversif.
Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser. On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux.
En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté. Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur.
L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité est bon socialement, ce qui menacerait de l’éveiller doit être ridiculisé, étouffé, combattu. Toute doctrine mettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutiennent devront ensuite être traités comme tels.
Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser. On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux.
En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté. Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur.
L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité est bon socialement, ce qui menacerait de l’éveiller doit être ridiculisé, étouffé, combattu. Toute doctrine mettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutiennent devront ensuite être traités comme tels.
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Les pays en voie de
développement avaient été premiers à être gagnés par la frénésie de la
Perle. Digit-All avait été malin. Au lieu d’appeler ces gadgets
électroniques puces, l’entreprise les avait commercialisés sous le nom
de perles, qui avait une connotation lisse, ronde et tellement "culturelle".
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La société dit que nous devons communiquer uniquement de façons traditionnelles. Nous devons nous conformer à ce qu’on attend de nous ou nous serons ostracisés, voire pire. Avoir nos propres idées pour répondre aux institutions qui nous formatent est pratiquement impossible. Le seul fait d’y penser épuise les gens. Que ferions-nous si nous n’étions pas distraits par des mots ordonnés pour former une structure qui nous oblige à nous comporter comme les structures l’entendent ? Sans une telle tyrannie et une telle obéissance au langage, verrions-nous plus clairement les véritables rouages de la machine qu’il y a à l’extérieur et à l’intérieur ? Tout autour de nous et dans chaque atome. Nous sommes conditionnés comme le chien de Pavlov – à réagir à une réserve illimitée de faux systèmes essentiellement creux qui reposent sur la gratification.
Alain Damasio (in Les furtifs)
& Günther Anders (en 1956 in L’Obsolescence de l’homme)
& Namwali Serpell (in Mustiks)
& Günther Anders (en 1956 in L’Obsolescence de l’homme)
& Namwali Serpell (in Mustiks)
& Jenni Fagan (in La fille du Diable)