30 mai
L’acupunctrice pique mes points sensibles. Je n’y comprends pas grand-chose, allongé sur sa table, sinon que je ferais mieux de me recaler sur les aspirations du Soleil et de la Lune. Paraît qu’il est déraisonnable de dormir à pas d’heure. Qu’ainsi on se dérègle, on a mal partout, on vieillit précocement et à la fin on meurt. Une perspective qui ne me plaît pas du tout, dans la salle d’attente j’ai vu la photo d’un homme qui faisait la grenouille, tête en bas, suspendu à une corde à l’orée d’une caverne.
Qu’y ont-elles compris, les chauves-souris, dormaient-elles en attendant la nuit ? Je sens que les aiguilles enfoncées dans ma peau dessinent comme un tracé cartographique superposé à mes nerfs plus ou moins sympathiques. De fait je m’apaise, à l’opposé d’un endormissement. Quand l’acupunctrice retire les aiguilles et que je me relève, la pièce est plus nette, je la découvre comme si je ne l'avais pas vraiment vue ; en nyctalope, comme si un accroissement perceptif m’avait été octroyé.