La première fois que nous avons couché ensemble, ça m’a rendue si heureuse que j’ai cru en devenir folle, convaincue que notre relation prenait le bon cap. Sa bouche était auréolée d’une odeur parfaite que j’arrivais presque à percevoir avec ma langue – ce qui composait cet arôme indéfinissable, je le savais, se trouvait dans les éléments physiques qui aimantaient nos deux corps.
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J’adore ton odeur, me dit-elle.
Je lui répondis : « Tu ne m’aimes pas. C’est mon microbiome que tu aimes. »
Elle éclata de rire (…). Je lui expliquai qu’une personne avait dix fois plus de cellules bactériennes que de cellules humaines et qu’il nous fallait cent fois plus d’ADN bactérien que d’ADN humain pour faire marcher l’organisme.
Ses yeux se plissèrent d’amour. Autrement dit, nous, on est l’échafaudage ? Et elles, le bâtiment ?
Je lui répondis : « Tu ne m’aimes pas. C’est mon microbiome que tu aimes. »
Elle éclata de rire (…). Je lui expliquai qu’une personne avait dix fois plus de cellules bactériennes que de cellules humaines et qu’il nous fallait cent fois plus d’ADN bactérien que d’ADN humain pour faire marcher l’organisme.
Ses yeux se plissèrent d’amour. Autrement dit, nous, on est l’échafaudage ? Et elles, le bâtiment ?
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Je réponds à côté, lui dis que la psychologie clinique oblige tout ce que nous appelons amour à rentrer dans les cases du pathologique, du délirant ou du biologiquement explicable, que si ce que j’éprouvais n’était pas de l’amour alors il me faut admettre que je ne sais pas ce qu’est l’amour, ou, plus simplement, que j’ai aimé un homme mauvais. Toutes ces formules vident l’amour de son bleu pour ne laisser qu’un poisson laid et dépigmenté battre de la queue sur la planche à découper d’une cuisine.
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Ils salissent tout, ces savants. Sous couvert de rigueur scientifique ils ridiculisent magie et poésie, réduisent tout à des composés ou des processus chimiques : là où vous voyez un beau soleil d'été, leur pauvre et terne esprit ne discerne qu'une naine jaune composée d'hélium et d'hydrogène ; et pour ce qui est du coup de foudre, à les entendre il ne s'agit que d'un vulgaire lâcher de noradrénaline commandé par l'hypothalamus aux glandes surrénales. « Est-ce que tu m'aimes ? - Non, c'est juste mon ocytocine qui se libère. » Ainsi mettent-ils le ciel plus bas que terre.
Megan Nolan (in Acts of Desesperation)
& Richard Powers (in Sidérations)
& Maggie Nelson (in Bleuets)
& Marcus Malte (in Aux marges du palais)
& Richard Powers (in Sidérations)
& Maggie Nelson (in Bleuets)
& Marcus Malte (in Aux marges du palais)