lundi 12 octobre 2020

Attentives #13

Je pensai aux cartes topographiques dont se servent les grimpeurs et les amateurs de courses d’orientation, cartes qui donnent, grâce aux lignes joignant les points de même altitude, une sensation en deux dimensions du relief tridimensionnel du monde connu. Il fut un temps où la même idée était à l’œuvre sur les cartes météorologiques à la télévision, avec les isobares, ces courbes reliant les points de pression atmosphérique égale, avant que tout ne redevienne encore plus simple, éclatants soleils à pétales, tels qu’un enfant pourrait en peindre, et nuages mousseux. Les cartes, topographiques ou autres, et les plans nous intriguent par leur nature de métaphores : outils qui nous donnent une notion de quelque chose dont la vérité est bien plus riche mais sans lesquels nous ne percevrions rien et ne trouverions jamais nos repères. C’est ce que font mystérieusement les plans et les cartes : ils occultent l’information pour nous informer un tant soit peu.

Comme le plan du métro de Londres, dis-je.

Il n’indique jamais, enchaîna Zafar, où sur la terre se trouve telle station. En un sens, ce n’est pas du tout un plan mais un schéma ; une représentation non pas topographique mais topologique (…)

La perte d’information et de compréhension que tout acte de représentation entraîne est l’effet d’un acte de destruction qui répond à un besoin. Il semble peut-être que nous ayons fait un pas en avant, mais en réalité nous avons fait un pas en arrière et deux pas en avant. Chaque fois que nous voulons comprendre quelque chose, nous devons simplifier, réduire et, en outre, renoncer au projet de comprendre en totalité, afin qu’il soit possible de comprendre un tant soit peu. Cela est vrai, je pense, de toute entreprise humaine.

Zia Haider Rahman (in A la lumière de ce que nous savons)

(1931)


(1933 - désigné par Harry Beck)


(2012 - désigné par Maxwell Roberts)