mercredi 5 avril 2023

Sous le sabot d'un cheval

2 mai
 
     Je somnambule.
     Greta Thunberg est déjà une vieille dame au regard des urgences gâchées. Le monde est déjà effondré.
     Et j'ai mal au cou-de-pied bien que j’aie remis de vieilles tennis, je dois le constater en sortant de la gare d'Austerlitz. Une après-midi à Paris où j'aurais arpenté les quais de la Seine, sans me perdre cette fois, j'aurais fait quelques courses, avide de ces dits "produits culturels" qu'on ne trouve pas sous le sabot d'un cheval, et j'aurais repris le train. Sauf que non, il me faut m'asseoir, examiner mon pied et choisir entre argile verte et arnica. Le péquenot a moins fière allure, boitant sous son sac à dos.
     Dans le métro les gens sont rivés à leur téléphone. Tous.
     Si l'un d'eux relevait la tête et croisait mon regard, il serait embarrassé par mon obsolescence.
     Si l'un d'eux décalait d'un cran sa tête baissée vers mes pieds, il noterait le trou dans ma tennis noire, bien qu’assorti à ma chaussette, à proximité du gros orteil.
     Dans le train du retour, le contrôleur qui semble avoir vécu deux fois moins longtemps que moi valide mon titre de transport en disant "Parfait". Ce qui me procure un semblant de réconfort.
     J'écris depuis l'ordi de mes amis un mail à mes amis, tinte une sonnerie qui m'avertit de l'arrivée de mon propre message sur leur boîte mail, leur ordi. Il y en a 2921 autres en attente.
     Hors connexion je me dépeins en inconsolé jadis, devenu inconsolable.
     Tandis que des sociopathes croient pertinent de qualifier Greta Thunberg de dépressive, comme si c'était une insulte, comme si cela dépeignait une vérité.
     Dans ma chevelure emmêlée, où j'ai ramené quelques atomes du parfum des paulownias de la Contrescarpe, il n'y a pas trace de tique.
     Ni sur mon cou-de-pied par l'argile verdi.