Les ouvriers
donnent de grands coups de marteau pour assembler (ou désassembler ?) un
échafaudage voisin. Dans les interstices sonores on peut entendre s’élever le
chant d’un oiseau nidificateur. Quand les troglodytes mignons auront été
chassés par les ouvriers casqués, et que dans les interstices on n’entendra
plus qu’une rumeur de maintenance humaine, alors il sera temps pour Binh-Dû de
déménager.
Le ciel
traversé de stratocumulus correspond parfaitement au désir de Binh-Dû. Oui,
c’est exactement ce qui lui convient, cette élévation cotonneuse, ce défilement
serein, l’alternance aléatoire des ombres et des ensoleillements. L’affirmation
du bleu. L’approfondissement des perspectives. C’est sous ce ciel que Binh-Dû
choisirait de vivre sa vie. Comme une attirance érotique vers une certaine
qualité de peau.
Contre sa
peau Binh-Dû perçoit la raideur du flocage d’une tête de mort, sur le vieux
tee-shirt qu’il porte à l’envers. Non pas le devant derrière mais les coutures
à l’extérieur. Est-il à ce point à court de tee-shirts ? Ou est-ce encore
l’instinct carnivore ? Une femme le croise, un ananas à la main tenu par
la rosette, telle une arme dont elle se ferait un plaisir de lui asséner un
coup sur le crâne. Peut-être devrait-il porter un tee-shirt bleu ciel.