mardi 30 août 2022

Aperçus d'altitude - 9

La bêtise humaine n’a d’égale que mon arrogance, voilà encore une fois que je me perds. Je les aurais mis à bas, ces empilements de pierre trop fréquents, fallait-il être idiot et considérer les autres à son image pour baliser à ce point le chemin en dépit du bon sens, ou était-ce une mauvaise blague, il me semblait évident que le chemin ne pouvait pas se diriger vers ce flanc de montagne rocailleux. Une heure plus tard je m’extirpe à grand peine d’un bosquet de rhododendrons, griffé de partout, giflé par la végétation traversée à l’aveugle, tant je me suis obstiné à voir dans des sentes d’animaux le sentier fort mal indiqué qui aurait dû, croyais-je, contourner la paroi rocheuse. Et ainsi me retrouvé-je à mon point de faux-départ devant les empilements de pierre honnis…
Qui fort judicieusement, pour peu qu’on s’y fie, mènent à un passage discret entre les rochers, à partir duquel le sentier, surplombant confortablement les rhododendrons, invisible en contrebas, à mi-hauteur s’accroche à la montagne.
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A un moment on cesse les délicatesses, il n’est plus question d’une malheureuse piqûre d’ortie rencontrant une opportune griffure de ronce, mais de subir le fouet des unes et des autres. Sur coups de soleil. Et peau déshydratée. Et l’on est si fatigué, et l’on a si faim qu’on mangerait l’avocat avec sa peau, la sardine et son huile, tout juste recrachant le noyau. Alors on se sent bien. On a retrouvé le goût du confort, ce confort trop facile qui nous asservissait hier et qui, très relatif aujourd’hui, nous sera caresse, aux deux rives d’un accès de sauvagerie.