Les
montagnes exhalent des nuages verticaux. En haut du col, Binh-Dû reprend son
souffle, quand arrive sur le chemin, venant de l’autre côté, l’être surhumain
qu’il était une ou deux décennies plus tôt. Non, ce n’est pas une question
d’âge mais l’oubli de l’hubris, à force d’humilité forcée, son abandon. L’oubli
que Binh-Dû aussi est – surhumain. Marcher n’est pas une fatigue, selon quelle
loi ? Est-il bien nécessaire de manger ? L’être surhumain venu de
l’autre côté dresse en équilibre impossible une pierre sur le cairn. Un, les
nuages sont les exhalaisons des montagnes.
Deux,
les montagnes sont des lèvres qui s’épanouissent en pétales dans une
merveilleuse lenteur. L’amour doit être absolu. Et la détestation ?
Surhumain sinon rien, Binh-Dû souffre d’une rancune effroyable contre le genre
humain. Il ne pardonne même pas le futur. Mais s’il ne pardonne pas, sa rancune
le détruira. Un barbu lui sourit gentiment. Il s’agit de rechercher la joie
indépendamment de toute la tristesse. Certains rêves attestent d’un blocage,
sentier éboulé, saison déclinante. D’autres boucles sont vertueuses, où l’on
revisiterait le bonheur et ses exigences.