Le
confort est un repli, le confort est une abstraction. Un rêve organisé, comme
on le dit de certains voyages. Le confort est un voyage pour valise à roulettes
– hors macadam ça ne passe plus. Un « agréable voyage », ainsi que
nous le souhaite sans en rien penser le conducteur du train. (Ses intonations
montantes, inculquées en stage d’expression orale.) Le confort est une
concrétion, un mausolée en construction. Rempli d’objets-doudous. On n’y a pas
mal. On s’y fait. On y meurt. Le confort est un progrès sans suite. Une
merveilleuse chance de durer. Le confort est une garantie et un poison lent. Le
confort est une menace d’épouvante. Où est ma tablette de chocolat ? Le
confort est une addiction.
Ils
vivent avec le sentiment de ne pas avoir le choix. Ils le disent :
« Je n’ai pas le choix ». Au téléphone dans le train, refermant leur
laptop, il y a de la fierté dans le constat. Une image de soi, courageuse,
résignée, nostalgique déjà de la vie qu’ils auront dilapidée. Toute cette
humanité vaincue. On pourrait les décrire à l’infini. Leur conformisme, leurs
petites audaces, leurs doudous d’adultes. Un air égaré. Tous pareils – tous
amochés. Et soi ? L’espoir de ne pas être autant zombifié.
Mon
confort n’est pas le tien. Mais mon confort est comme le tien. Il me rend
peureux. Pusillanime. À cause de mon confort je préfère ne pas. Il est collant.
Il ne suffit pas de s’en détacher, impossible, il faut s’en arracher.