Guy
et moi, nous nous entendons à merveille, et je ne veux rien faire qui puisse
infiltrer du poison dans cette harmonie, surtout pas remettre en question ce dont nous nous
passons très bien : l’amour.
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Peut-on
désirer être avec quelqu’un tout le temps, satisfaite la plupart du temps, et
parallèlement regretter de ne pas être seule ? Et pas à des moments
séparés mais en même temps ? Tout le temps ? Je voudrais être seule,
mais il ne vaut mieux pas. (…) D’habitude, j’allume la radio et je laisse les
voix, la musique envahir la maison ; c’est une présence qui me tient
compagnie tout en se passant de ma participation. J’aimerais pouvoir en faire
autant avec les gens. J’aimerais qu’on puisse en faire autant avec moi. Où
est-il, l’homme qui n'aurait pas besoin que j’aie besoin de lui ? Je ne
sais pas ce que je dis. C’est parce que j’ai besoin de lui que je suis ici,
dans cette pièce.
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« Tu
es en train de tomber malade », lui dit-il lorsqu’elle ouvrit les yeux.
Elle
se redressa pour s’asseoir, assommée, avec une idée très vague de l’heure. Il
était debout, habillé, et s’activait après le poêle. Il avait fixé la nouvelle
bouteille de propane – un véritable homme à tout faire. « Quelle heure
est-il ? demanda-t-elle. Comment ça, je suis en train de tomber
malade ?
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Tu as éternué en dormant. Quatre fois. Je n’ai jamais entendu qui que ce soit
faire ça avant. »
Elle
s’étira, se sentant très fatiguée et un peu endolorie mais rien d’autre. Pas de
maux de tête, une menace qui s’était estompée. « Je crois que ça
va. » Elle respira l’odeur généreuse des oignons frits dans
l’huile, quelque chose de merveilleux. De temps en temps, il lui fallait garder
tous ses esprits pour s’empêcher d’aimer cet homme.
Nathalie
Kuperman (in Nous étions des êtres vivants)
& Marlon James (in Brève histoire de sept meurtres)
& Barbara
Kingsolver (in Un été prodigue)