mardi 13 avril 2021

Des galettes individuelles

6 janvier 2020

(10/n)

Le quotidien reprend ses droits, comme on dit, puisque l’épiphanie n’est pas un jour férié. Dans la boulangerie où il va souvent s’acheter un sandwich, il y avait des galettes individuelles – ou alors pour deux vieilles personnes qui n’auraient plus d’appétit ? Plus de dents à casser sur une fève, dans l’énergie envolée d’un coup de mâchoire ? Il a failli céder à la tentation avant de se raviser. Ce n’aurait pas été du jeu – comme on disait dans les cours de récré de son enfance – il aurait d’office gagné la couronne. L’aurait portée au magasin, roi en sa boutique, au siège son patron n’en aurait rien su. Cela aurait peut-être attiré le chaland, maintenant qu’on peut le voir facilement à travers les grandes vitrines. Ce royaume vaut-il qu’on s’y aventure ? Que fait ce roi assis derrière son comptoir ? Y a-t-il bonne fortune à trouver céans ? Mais non, simplement de l’attente. Le petit Jésus s’en retournerait dans son berceau, lui qui avait tout un plan divin à accomplir en relativement peu de temps. Une corbeille de présentation s’est décalée sur l’un des plots d’exposition, laissant une trace de poussière. Quelqu’un au passage, avec son sac en bandoulière ou le pan de son manteau ? Le matin il a encaissé une dizaine de personnes tout au plus. Il lui semble parfois que sa vie a été écrite par un inconnu qui ne lui voulait pas particulièrement de bien, ni de mal d’ailleurs. Un inconnu qui s’en foutrait un peu. L’âge du Christ est dépassé, sans retour possible.