vendredi 23 avril 2021

Ou bien la force de l'amour

13 janvier

(17/n)

Les jonquilles éclosent très en avance au-dessus du périphérique où l’on a aménagé une sorte de jardin. Il y a des pâquerettes sur les pelouses, c’est n’importe quoi. Ou bien la chaleur dégagée par les voitures en-dessous ? Ou bien la force de l’amour. Lydia tient toute sa force de sa fille, et sans doute même quand sa fille n’était qu’un désir vague, un projet d’avenir, son énergie était tout entière tendue vers la survenue de Dana, comme une attraction lunaire ou le cycle des saisons. Dirait-elle. Elles sont fortes d’être deux, c’est l’amour, ça l’était avant que Dana ne naisse, ça le sera après qu’elle sera partie mener sa propre vie. Je voulais parler de Lydia mais c’est de Dana qu’il faudrait parler.

La sœur de Lydia ne montre pas ses inquiétudes ni ses douleurs. C’était sa cinquième opération depuis l’accident, peut-être pas la dernière. Quand elle pleure c’est en conséquence d’une lésion sur un de ses nerfs lacrymaux. Son mari ne s’y trompe plus, elle détrompe ses enfants en souriant comme elle le peut, Lydia se sent un peu étrangère. Elle a heurté par mégarde le coude d’une adolescente dans l’escalier du centre commercial qui lui a dit gentiment « Il n’y a pas de mal, Madame », ce qui l’a choquée. Comme si elle était une prof d’un âge respectable. Lydia a le sentiment d’avoir toujours quinze ans, et qu’il faille le cacher à sa fille. Quoique c’est seulement avec Dana qu’elle se sent plus adulte.