vendredi 25 octobre 2019

25 janvier


    La pelouse blanchie de givre matinal nous apprend que personne ne l’a foulée ce matin. À midi, toujours personne. Les joggers respectent les sentiers balisés, les enfants sont gardés à l’intérieur des habitations, les honnêtes gens ont mieux à faire que de sortir se promener. Normal, c’est l’hiver. (Vous vous souvenez ?)
    On se souviendra que les êtres humains du début du XXIème siècle préféraient mourir de chaud plutôt que d’éprouver le froid. (S’il reste encore quelqu’un que cela intéresse.) Ils ne voulaient pas non plus éprouver la faim, la peur, la solitude, la désorientation ni l’imprévisibilité. Pauvres d’eux-mêmes ! Ils avaient oublié ce dont ils n’avaient pas l’usage garanti, ils se gavaient d’obsolescence. (Ce concept daté n’aura bientôt plus guère de pertinence, annihilé tel le serpent avalant sa propre queue.) Sur la terre meuble, si tout continue mal, seuls les plus brutaux des humains braveront les éléments. (Et quelques innocents discrets.) Ils chercheront qui assassiner de préférence avant de s’entretuer. Ils auront toujours soif. Ils se lèveront dès l’aube. (S’il reste du ciel.)
    Au soir, des gardiens en scooter électrique émettent des sifflements stridents. Ce n’est pas incompatible, se justifieraient-ils. Ils pourraient tout expliquer quant à l’obsession de tourner en rond, et en les écoutant on s’efforcerait de ne pas pleurer trop tôt nos chaudes larmes en réserve. Mais qui es-tu, qu’est-ce que tu racontes !