Tu
prends le soleil sur le perron de ta maison de pierre. La vue porte loin, une
vallée, des montagnes. Dans les arbres chantent les oiseaux. Tu inspires à
pleins poumons les parfums renaissants du printemps. Y a-t-il quelqu’un près de
toi, qui viendra te rejoindre, poser un baiser sur ta nuque ? Cela se
pourrait. Il y a une rivière en bordure de prairie, tu l’entends murmurer quand
la brise souffle dans ta direction. Tu ne voudrais être nulle part ailleurs.
Même là où tu serais non moins heureux. Tu fermes les paupières pour y enclore
une lumière orangée.
Puis ce
sera la nuit. Ou une journée de crachin brumeux, tu seras réfugié à
l’intérieur. Dans ta maison de pierre les chaises sont dépareillées, tu n’en
utilises qu’une pour prendre tes repas. Tu es seul, cela va de soi, et c’est
aussi bien comme ça : qui voudrait perdre ici son temps ? Tu es seul
et tu es toi-même, sans témoin, tel que personne ne te connaît. Sans besoin de
faire semblant. Tu as un peu froid mais tu peux superposer des épaisseurs. Tu
es arrivé. Binh-Dû serait parfaitement heureux, tu te sens déprimé comme un
hérisson blessé coincé dans un fossé.