Encore
une cinquantaine de fois, monsieur le bourreau ? S’il vous plaît. Sentir
le choc au cœur lorsque l’horizon d’un coup se dévoile. Avancer lentement sur
la dune, vers la mer. Embrasser le ciel immense, les nuages, la couleur des
vagues. S’asseoir. Regarder regarder sentir respirer respirer encore regarder
avaler le paysage tout entier. Goûter ce qui d’éternité était souvenir, la
plage, la mer, le ciel et l’horizon. La beauté de cette ligne, sa courbure
légère, la paix. Rêver assis, s’émouvoir. S’élever, s’agrandir. Aimer.
On ne
lit pas au pied des éoliennes. Ce n’est pas vrai. Au pied des éoliennes on
ramasse des cadavres d’oiseaux coupés dont le chant aura été couvert par le
bruit sourd des pales. On ne navigue pas entre les éoliennes. Ce n’est pas
vrai. On y vomit nos rêves d’évasion et nos ultimes espérances. On ne sauve pas
la planète avec des éoliennes. Ce n’est pas vrai. On achève de la saturer
d’électricité superflue. Lire était contempler, tu te souviens. Lire, c’était
goûter l’horizon. C’était vivre. Et la lame assassine tranche le cou du monde.