21 août
Jour 14
Un enfant disgracieux aux yeux
translucides vient te prendre la main au détour d’une rue. Tu le
reconnais : « Tu es déjà venu il y a une vingtaine d’années,
non ? » Il acquiesce. « Alors c’est que je suis
mort ? – Non, mais tu ne vis pas assez. » Ses parents l’appellent
car il ne vient pas de nulle part, tu le remets dans leurs bras. Se peut-il qu’un agneau ressemble tellement à un cabri ?
Le meilleur voyage dans l’espace qui
puisse se concevoir, c’est la réincarnation. Ceci étant, le présent doit se
vivre comme tel, bien qu’étant déjà un temps révolu. En ce temps-là il n’y
avait pas d’éoliennes et les deuils étaient encore à venir. Au présent le passé
fait peine, on ne peut le visiter que derrière une vitre – impossible de
communiquer ; nous sommes les fantômes de notre propre passé.
Puis le vent moissonne les pensées
tandis que virent les gypaètes barbus. À la réflexion (dans le futur), tu n’as
pas vu qu’ils portaient la barbe. Ou même une barbiche, tels des boucs. En
revanche, les moutons d’altitude ressemblent à des moutons – ou à des lentes
sur le crâne tondu de la montagne. Et les vaches ne sont pas des taureaux. (Et
le bélier, était-il un bouc, finalement ?) Et Binh-Dû, est-ce toi ?
N’ayons pas tant de craintes.