6 juillet
Le monde est beau si tu n’as aucune conscience des
pollutions que l’homme lui assène ni des crimes qui s’y déroulent. Ou alors il
faut s’efforcer d’oublier. Et les petits bateaux de pêche ne brûlent plus des
tonnes de gasoil pour épuiser jusqu’à la lie les fonds marins, et les rochers
ne portent pas la trace d’anciennes marées noires et de réguliers dégazages, et
l’océan lui-même n’est pas le tombeau de milliers d’immigrants abandonnés à
leurs tortures, et la canicule est simplement synonyme de bel été, et la crème
antisolaire dont tu te badigeonnes ne tue pas à petit feu, et l’eau que tu bois
à la bouteille ne plastifie pas tes intestins, et il y a encore un avenir, et
on s’en sortira toujours, et nous serions amoureux, et rien d’autre n’aurait
plus d’importance…
- Un ciel sans nuages c’est une moitié de mer en moins…
- Bon, c'est pas bientôt fini ? Profite !
Sauras-tu
distinguer le cri d’une mouette rieuse du rire de cette femme joyeuse ? Ce
rire ! Ce grain de folie. Comme on doit l’aimer. Ou la détester – Tu nous
embarrasses tous, sois plus discrète !
Alors
tu vas te baigner dans l’océan, une dernière fois. Nager, ton corps doucement
soutenu – rêve de fœtus prenant le large, partant à l’aventure, insouciant.
Puis ton ombre bien découplée sèche à la verticale.
Une
dernière fois les falaises et le soleil couchant. Solliciter ce qu’il te reste
de tolérance car tu as beau t’éloigner du fest-noz aux sardines grillées, les
échos d’un biniou amplifié te suivent. Ta tolérance se mue en indulgence. Tu
croises un beau regard.
Le désespoir, apprends-tu, n’est qu’une
vue de l’esprit.