La nuit est un voyage commencé tard, poursuivi dans l’illusion d’une paire de volets fermés. Et Binh-Dû s’étonne encore qu’il ne soit pas midi passé, plissant les yeux face à l’aveuglement du soleil. La buée a séché sur les vitres. Dehors, l’âcreté de l’air incite à manger du poulet, chair rissolée dans l’huile d’olive.
Au passage à niveau, il contemplait une bouteille en plastique vide, méditant d’y graver un message. Le crissement du stylo sur le PET, il se le représentait clairement, mais ce qu’il aurait à dire ? Peut-être eût-ce été en rapport avec la fille aux cheveux roux qui riait aux éclats en renversant la tête en arrière – du fait de sa relative petite taille.
Ou avec son père qui n’est plus qu’un point sur l’horizon – impossible de déterminer s’il s’éloigne ou se rapproche. La mer est d’un turquoise lagonaire, et sa paix est à l’unisson, pas même un poisson pour en troubler la surface. Paupières closes au seuil zénithal, yeux rouverts, ce jour s’absorbera donc en bleu pisseux.