dimanche 26 août 2018

26 août


Depuis son lit quand il s’y adosse Binh-Dû peut voir une tranche de rue, peu passante, très peu roulante. Un large pan de mur quasiment aveugle. Un pavillon plus éloigné doté de deux fenêtres à sa hauteur par lesquelles il surprend parfois une adolescente répétant des chorégraphies de boîte de nuit. Aucun réfugié démuni dans l’angle de vue.

 Quand les corbeaux croassent aux petites heures du jour, c’est une occasion rêvée de s’exercer à l’empathie. Plutôt que de fermer le double-vitrage, Binh-Dû décrispe son visage (la force des criaillements éraillés lui a plissé le front) et se met en état de réceptivité. Il essaie de ne plus penser à ce qu’il ferait s’il avait une carabine entre les mains.

 Avec son voisin c’est une autre paire de manches. L’organe vocal du voisin offre non moins de puissance mais un plus vaste registre de possibilités, incluant le chant sous la douche, le rire au téléphone, sans même qu’il soit nécessaire de mentionner la capacité d’activer tel ou tel engin sonore à faire trembler les murs. Binh-Dû s’efforce d’aimer son prochain.