samedi 9 juin 2018

9 juin

Ce n’est pas la joie, croit constater Binh-Dû, tant se lever ce matin lui fut un effort. L’assertion est prophétique, elle ne s’en impose pas moins. Quelques lunes plus tôt il se riait de la distinction nulle entre se croire amoureux et l’être. Maintenant, que va-t-il faire ? Glisser du sentiment de la vieillesse à celui du désespoir ? Se souvenir des temps bénis, cela se passait ici et cela se passait là, et cela n’a plus lieu de se passer désormais ? Mais qui voudrait le suivre au fil de ces considérations méandreuses...
           Quelqu’un dans un an lui dira J’étais là. Tandis que tu te lamentais j’étais tout proche et je n’attendais qu’un appel de toi. Peut-être n’attendais-je pas avec une telle intensité, mais j’aurais répondu. Quelqu’un mais qui ? Binh-Dû fait un tour d’horizon comme on se retourne dans son lit, il n’aperçoit personne. Quelqu’un dans un an lui dira Je n’étais pas encore là mais sur le point d’apparaître, n’en avais-tu pas le pressentiment ? Le soir venu Binh-Dû ferme les yeux, il entend mieux. Il ronfle.