Il regarde en
face la mer asséchée de sa honte, il ne cille pas sous le soleil. Comment
est-il arrivé là, Binh-Dû l’ignore, mais mieux vaut tard que jamais, de plus en
plus tard ce serait. Déjà il s’est remis en marche sur le sol craquelé. Sa peau
est sèche, comme s’il n’y avait plus de sueur à gâcher. Le soleil est la
meilleure boussole qui se puisse, pourvu qu’on s’accorde à sa fixité. Au loin,
Binh-Dû aperçoit deux silhouettes disproportionnées, sans doute un mirage, qui
vacillent dans la chaleur ambiante. Surtout conserver la tête claire.
Derviche,
garde-toi de l’étourdissement ! Dans la caboche, tout est bien calé. Accès
privé, personne n’est autorisé à entrer, pas même les amies. Lui seul s’y
retrouve, avec ses fétiches, ses meubles, ses habitudes, et même ses cachettes
– on se demande bien à quoi elles servent. Binh-Dû parfois cherche quelque
chose qu’il a soustrait un jour à sa propre attention, méfiant au point de ne
pas se faire confiance à lui-même. Et il a oublié pourquoi. Quoi. Où. Il
boirait volontiers un simple verre d’eau fraîche. Il peut toujours rêver.