Les
malentendus féconds portent à rire. À un moment Binh-Dû dit « Moi aussi je
t’aime » et cela n’a rien à voir. C’est un rire étrange, à l’intonation
incertaine. Comme de fixer la nuque de sa partenaire, toutes
oreilles aux aguets. En pleine nuit le voisin saute sur son plancher pour
amuser une fille rencontrée quelques heures plus tôt en boîte de nuit,
heureusement ce n’est pas le voisin du dessus. Les corbeaux se gèlent les ailes
en attendant que le ciel rosisse à l’est. Ailleurs, des lèvres d’éternel bébé
cherchent un sein tiède et odorant.
Il n’en
faut pas tellement pour calmer l’angoisse : une confirmation avantageuse, le souvenir de
ce qui est de toute éternité, un zeste d’ironie désinvolte. Un petit coup de
chauffage électrique. Non, Binh-Dû n’offrira pas le thé aux agents assermentés,
cela prêterait à malentendu. Si compliqué de faire la distinction entre ce
qu’il aspire à devenir et ce qu’il sait ou ne sait pas être dès à présent. Déjà
qu’il y a doute sur son identité. Il dansera un peu si le groove surgit, il se caressera la barbe (seuls les poils blancs
crissent). Et ce sera bien assez.