vendredi 16 novembre 2018

16 novembre


Quand il était à l’âge des examens de passage, Binh-Dû rêvait de remplacer la complexité des apprentissages par une performance aussi simple que de courir plus vite. Il y aurait une ligne d’arrivée à portée de vue, un signal de départ, un chronomètre, et en une poignée de secondes ce serait réglé. Adversaires en option, "plus vite" suffirait. Il était rapide. Dans ses rêves il ne touchait pas le sol. L’une des danseuses est si légère qu’on voit toujours l’air sous ses pieds, elle n’est même plus une danseuse mais la danse en soi. Binh-Dû ne comprenait pas qui il était. Il constatait l’intelligence dans sa contemplation, sa retenue, sa mélancolie, son désespoir. Tout autant que la bêtise abyssale qui se révélait dès qu’il ouvrait la bouche. Alors il se taisait, conscient que c’était la meilleure manière de tromper son monde. L’un des danseurs vient l’inclure dans le groupe, comme s’ils faisaient œuvre commune – les joyeux et le regardeur. Les nuits, Binh-Dû retourne souvent à l’époque des examens, il est en retard, il a oublié. D’autres fois il mène des discussions pétillantes avec de parfaits interlocuteurs. La complexité n’est plus un ennui mais une jouissance élevée. Il s’éveille. Il a encore de l’espoir.