Ils se tiennent au milieu du carrefour, elle le regarde s’en aller et
Binh-Dû sait bien ce qu’elle pense. Elle désapprouve. Elle déplore. Elle
regrette. Elle s’attriste pour lui, qu’il continue à croire à ces fariboles
patareligieuses, et qu’il reparte s’enfermer pour une nouvelle « retraite »,
qu’il s’imagine toujours avoir une vérité à découvrir. Her face is of a splendid depth.
Mais elle ne veut plus qu’il contemple son visage, du moins pas tant
que le risque demeure de se perdre dans son regard à lui. Loin d’ici, sur un
continent insulaire, une autre femme sort de l’eau, c’est le printemps, au
soleil le sel sèche vite sur la peau. Elle rit, et sa petite fille accourt se blottir
dans ses bras. C’est une femme aimée, née pour le rire, qui revient à la vie.
Y a-t-il rien de plus simple que d’aller à la rencontre des êtres qu’on
aimerait ? Une chanteuse parmi d’autres, par exemple celle-là garde le
sourire même quand elle parle, nul doute qu’elle en gratifierait Binh-Dû. Puisqu’elle
n’a pas connaissance de son existence c’est lui qui devra faire le premier pas,
enclencher l’évidence. Il hésite encore, la foule du carrefour l’enserre.
[merci à Léopoldine]