La coalescence opère, en un phénomène qui échappe à la volonté. C’est
ce qui se produit lorsque les conditions sont réunies. Une seconde auparavant
le temps n’était pas encore venu, une seconde après c’est accompli. Binh-Dû
allonge ses bras sur le dossier de son gradin, dans la salle plongée dans
l’obscurité. Au centre, sur la scène, la danse avance en dégradés, tout concourt.
Les matières passent aux tamis du métallique, du végétal et de l’animal, les
qualités se précisent. Ne manque plus qu’un public, son souffle collectif
dressera l’étamine.
Mais le public n’est jamais qu’un tournant de chemin, il y a tant
d’autres choses à percevoir à chaque instant. Dans les replis organiques du
cœur, tant de cavités, de couloirs, d’étonnements. On pourrait rester sa vie
durant à ressentir l’oméga de la pulsation, Binh-Dû en serait bien capable, la
nuit il pose l’oreille sur son bras, s’il est seul. Il rêve que son amie
regrette de l’avoir quitté. Du cœur est inséparable l’esprit, ou alors il y a
maldonne. La lumière tourne autour du soleil, perturbant le sens des
proportions, sur la grève aucune vague même orpheline n’est inutile.