Binh-Dû espérait bien devenir célèbre aujourd’hui mais ceux qui, de
cette aspiration, auraient pu lui faire l’aumône en ont décidé autrement. Il
est renvoyé à ses pénates, les portes d’un monde idyllique se sont refermées,
qui ne se rouvriront pas de sitôt. Restent les fenêtres bien sûr, ou un trou
dans le grillage, derrière la haie. Ou l’idylle suivante sur la route ?
Cela lui rappelle une histoire de chiens. À une époque, Binh-Dû pensait
en chien au moindre prétexte. C'étaient des êtres sympathiques, pas
contrariants, affectueux, misérables, sincères, demi-sauvages, des substituts
de premier choix. Il s’identifiait à ce qu’ils subissaient. Mais il n’avait
aucune tendresse pour eux, curieusement.
Que la sexualité puisse être une fin en soi ne lui a jamais non plus
traversé l’esprit. Binh-Dû est trop sentimental. Ou alors il aurait fait
carrière, des fans indésirables lui auraient demandé des autographes érotiques.
Au lieu de quoi il se languit. Il n’envisage pas d’embrasser toute une chacune,
sans parler d’un chacun. S’il était célèbre, il se prendrait moins au sérieux.