Il est encore dans la forêt – le temps qu’il y passe, c’est
fou ! En même temps, il survole. Les loups en-dessous de lui lèvent leur
tête grimaçante, ce ne sont même pas des chiens. Ils sont les évadés de la
matrice. Lui se tâte, l’avantage quand on plane c’est qu’on peut aussi
atteindre des parties de soi qui sont oblitérées le reste du temps par des
points de contact. En un sens, planer c’est être plus que nu. Et davantage bébé
qu’un bébé. De là-haut il voit des choses qui ne se soupçonnent qu’à peine
ici-bas. Son point de vue unique mériterait un peu plus de confiance de sa part, et de la
gratitude aussi. Au lieu de ces grimaces. Quand il était en ville, il allait se
planter face aux caméras de surveillance – trafic, incivilités,
circuits de consommation – pour narguer les opérateurs fantômes. À l’occasion
il trifouillait dans les fils et provoquait des disjonctions. Puisque le silence était
soumis par la rumeur incessante des moteurs, il parlait de fantôme à
fantôme en ouvrant exagérément la
bouche, muettement. Il proférait des sons imaginaires, sans queue ni tête, ah
il s’amusait bien. Non, il ne s’amusait pas du tout. Il résistait comme il
pouvait. Comme on s’évertue à coincer les pales des géants, là, juste à la
faiblesse de l’armure. Plutôt s’élever plus haut et se moucher dans un nuage.