Il désire tant
être adoré ! N’est-ce pas ainsi que les choses devraient être, bien
carrées, irréprochables, indubitables ? Binh-Dû apparaissant dans sa
splendeur, et ceux qui ont des yeux pour
voir se retournent sur son passage, ceux qui ont l’honneur d’avoir été par lui
élus rivalisent de prévenances, se confondent en gratitude, ceux qui pourraient
prétendre se hissent au plus haut d’eux-mêmes. Celles surtout, pour être franc. Et lui, magnanime, conscient qu’il
n’y peut mais d’être si merveilleux, dispense ses bienfaits.
Pour commencer la
barque est percée. Alma se prend la tête entre les mains, Corpus se la cogne
contre un arbre. À s’entêter ainsi il creusera une nouvelle embarcation
directement dans le tronc sur pied, il n'aura plus alors qu'à faire basculer
l’arbre à l’horizontale et tailler les finitions avec ses dents. Mais ce
n’est vraiment pas réaliste, si ? Ensuite, le fleuve charrie toutes sortes
de débris meurtriers. Enfin, il semblerait que personne ne les ait suivis.
Personne ne les menace. Seul Binh-Dû les observe, un air avisé sur le visage.