Le mouvement attire l’œil, sans mouvement tu pourrais aussi bien être
une pierre. Un chat perché au sommet d’une colonne, qui contemple le passage du
temps, indifférent tant à la pluie qu’au soleil, ses yeux ne cillent pas, ses
pupilles n’accommodent pas, il n’est là que pour faire illusion, trop évident
pour être vivant, parfaitement dissimulé à l’intérieur de lui-même.
Personne ne viendra te toucher. Tandis que si tu joues le jeu, selon
que tu sois homme ou femme, tu risques d’obtenir ce que tu es censé(e)
rechercher : le contact d’un autre corps qui satisfera cet étonnant besoin
de confirmation. Binh-Dû en retrait sur son banc observe sur la pelouse les
ellipses du désir. Parade des bisets, contre-parade des colombes.
S’il était un chat, il voudrait leur voler dans les plumes. Mais il
préfère laisser un sourire imprécis se diluer dans l’atmosphère. Il ne sait pas
ce qu’est la soumission à un désir prédateur. Il ne comprend pas comment ne
désirer que l’objet. L’excitation de la proie lui est étrangère, de même que
l’instinct du chasseur. Sa sauvagerie semble paisible.